Le Passe-Pierre du Bateau-Lavoir
Résidence de recherche et création à Semur-en-Auxois
Une exploration du patrimoine de l'eau
Comment l’Armançon, rivière iconique de Semur-en-Auxois, a-t-elle façonné le paysage, les matériaux et les savoir-faire de la ville ? Telle a été ma question de départ. Noms de rues, anciennes Tanneries, moulins, abattoir, foulon, lavoirs, et même un ancien atelier de menuiserie fonctionnant à la force de l’eau sont autant d'éléments qui témoignent du grand rôle qu'a joué la rivière dans l'activité économique de la ville.
Aujourd’hui plus calme, elle éloigne une partie de la population du centre-ville. Avec les Semurois.es, nous avons organisé des concertations citoyennes et un chantier participatif pour permettre aux habitants de se réapproprier cet espace à l’abandon et de traverser la rivière. En parallèle, j'ai mené des expérimentations sur les matières liées à l'eau avec différents artisans locaux.
Le bateau-lavoir et son passe-pierre
Élément de patrimoine original à Semur, le bateau-lavoir était un lavoir naviguant sur l’Armançon. C’est l'un des seuls encore visible en France. Pourtant, il se dégrade vite et sur place, aucune explication sur son histoire n’est proposée aux visiteurs en balade, qui se retrouvent perplexes en arrivant devant. Juste à côté, se trouve un passe-pierre : des pierres sur lesquelles on peut passer pour traverser la rivière. Sauf que les pierres du milieu ont été emportées par les différentes crues de l’Armançon, rendant le passage impossible et obligeant une partie des habitants à faire un grand détour pour rejoindre le centre-ville.
Un projet pour et par les habitants
Dans une démarche de co-création avec les habitants de Semur, j’ai organisé une concertation citoyenne qui a donné lieu à plusieurs phases de chantiers participatifs pour réfléchir ensemble à l'aménagement de cet espace.
Au début, beaucoup d’avis différents, notamment sur l’aspect et l’emplacement du passe-pierre, mais les avis convergent sur une chose : il faut traverser ! Nous avons donc décidé de construire une passerelle éphémère pour compléter le passe-pierre et observer ce qu’il se passe si la traversée est de nouveau possible. Très vite, les habitants ont montré un fort engouement et intérêt pour le projet en participant en nombre à la fabrication de la passerelle !
Tuiles, imprimerie & céramique
Des tuiles et des briques portant les inscriptions «Semur-en-Auxois» indiquent qu’une tuilerie était anciennement en activité dans la ville : la tuilerie Thévenot.
Stéphane Le Sauter m’a accueillie dans son imprimerie : Intaglio. Ici, tout est imprimé sur des machines anciennes avec des plombs d’impression. Je me suis donc inspirée de cette technique pour imprimer dans de l’argile, comme sur les anciennes tuiles.
Guidée par la céramiste Marcela Paz Undurraga, j’ai récolté, tamisé et estampillé de la terre non loin de l’Armançon puis nous l’avons fait cuire dans son atelier.
Sable de l'Armançon & verre
Florian Harling est souffleur de verre et récolte lui-même son sable dans les rivières pour en faire du verre. En fonction des rivières et de la composition du sable récolté, il n’obtient pas les mêmes teintes. Ensemble, nous avons fondu du sable récolté dans l’Armançon, que j’avais préalablement lavé et tamisé et avons obtenu un verre très foncé et malléable.
Pierre sèche & taille de pierre
Semur-en-Auxois est bâtie sur une résurgence de granit rose au milieu d’un plateau calcaire. On y trouve aussi du Sinémurien (dont le nom vient de «sinemuros», l’ancien nom de Semur), une pierre aux reflets bleus qui renferme de nombreux fossiles et témoigne de la présence de la mer autrefois. Avec Maxime Commerçon, tailleur de pierre qui m’a ouvert son atelier, j’ai appris les bases des outils et des types de pierres de la région.
Les murs en pierre sèche font également partie du paysage de Semur. Il s’agit de murs montés sans ciment, seulement grâce à la force que les pierres exercent les unes sur les autres. Ils ont l’avantage de laisser circuler l’eau, ce qui les rend beaucoup plus durables que des murs en béton. J’ai rencontré Hubert Bonal, bâtisseur de murs en pierre sèche, qui m’a appris les rudiments de cette pratique ancestrale.
Teinture végétale & Renouée du Japon
Grâce au service patrimoine de la ville et à l’office de tourisme, j’ai pu me familiariser avec la biodiversité locale. J’ai extrait des teintures et des pigments végétaux de différentes plantes récoltées dans la ville, puis mon attention s’est portée sur la renouée du Japon : plante très invasive, elle est présente en abondance dans la ville et ressemble un peu à du bambou, mais est beaucoup moins résistante. Je me suis donc demandée comment l’utiliser en tant que matière première, en la tissant sous forme de paniers, en la ponçant, etc.
